Page 13 - 2. La guerre civile
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point quitté sa province avec de mauvaises intentions, mais pour se
défendre des injures de ses ennemis, pour rétablir dans leur dignité
les tribuns du peuple qu'on n'a bannis de la ville qu'à cause de lui, et
pour recouvrer sa liberté et celle du peuple romain qu'opprime une
faction. Rassuré par ces paroles, Lentulus demande qu'il lui soit
permis de retourner à la ville, afin que la grâce qu'il a obtenue serve
aux autres de consolation et d'espoir ; car, dans leur effroi, plusieurs
ne voient plus d'autre ressource que de s'arracher la vie. Cette
permission lui est accordée ; il se retire.
23. Dès que le jour parut, César fit venir devant lui tous les sénateurs,
leurs enfants, les tribuns militaires et les chevaliers romains. Il y avait,
de l'ordre des sénateurs, L. Domitius, P. Lentulus Spinther, L.
Cécilius Rufus, Sex. Quintilius Varus, questeur, L. Rubrius ; en outre
le fils de Domitius, une foule d'autres jeunes gens, et un grand
nombre de chevaliers romains et de décurions que Domitius avait fait
venir des villes municipales. Quand ils furent en sa présence, César
les garantit des insultes et des reproches des soldats ; se plaignit en
peu de mots de l'ingratitude dont plusieurs d'entre eux payaient ses
nombreux bienfaits, et les renvoya tous sans leur faire aucun mal.
Comme les duumvirs de Corfinium lui offraient six millions de
sesterces que Domitius avait apportés et déposés au trésor, il les
rendit à Domitius pour qu'on ne pensât pas qu'il avait plus de respect
pour la vie des hommes que pour leur argent ; et cependant il était
certain que cette somme provenait du trésor public, et qu'elle avait
été donnée par Pompée pour la solde des troupes. Quand il a pris le
serment des troupes de Domitius, César lève son camp après être
resté sept jours devant Corfinium, fait une marche ordinaire, et,
longeant les frontières des Marrucins, des Frentani et des Larinates,
arrive en Apulie.
24. Pompée, instruit de ce qui s'était passé à Corfinium, va de
Lucéria à Canusium, et de là à Brindes. Il y fait venir de toutes parts
les troupes nouvellement levées, arme les esclaves et les pâtres, et
leur donne des chevaux : il forme avec eux un corps d'environ trois
cents cavaliers. Le préteur L. Manlius s'enfuit d'Albe avec six
cohortes ; le préteur Rutilius Lupus de Terracine avec trois : ces
dernières, ayant aperçu de loin la cavalerie de César, commandée
par Vibius Curius, abandonnent le préteur et passent du côté de
Curius avec leurs enseignes. Quelques-unes, fuyant par d'autres
chemins, rencontrent les légions de César, d'autres sa cavalerie. On
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