Page 15 - 2. La guerre civile
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propositions, ne lui fût pas renvoyé, et bien que ces tentatives
réitérées fussent autant de retards dont souffraient son activité et ses
entreprises, il résolut de persévérer à tout prix dans son premier
dessein. En conséquence il envoya Caninius Rébilus, son lieutenant,
ami intime de Scribonius Libon, conférer avec ce dernier. Il le charge
d'exhorter Libon à procurer la paix ; il demande surtout à parler lui-
même à Pompée. Il ne peut douter qu'une entrevue consentie par ce
dernier ne rétablisse la paix à des conditions équitables ; si, par
l'entremise de Libon, les deux partis se décidaient à poser les armes,
une grande partie de l'honneur lui en reviendrait. Celui-ci, après avoir
entendu Caninius, va trouver Pompée. Un moment après, il revient et
lui dit que les consuls sont sortis, et qu'on ne peut traiter sans eux
d'un accommodement. Après toutes ces tentatives inutiles, César
croit devoir enfin renoncer à son projet et ne plus songer qu'à la
guerre.
27. César en était à peu près à la moitié des travaux, à quoi il avait
employé neuf jours, quand les vaisseaux qui avaient transporté les
consuls et la première partie de l'armée revinrent de Dyrrachium à
Brindes. Pompée, soit qu'il fût effrayé des travaux de César, soit qu il
eût résolu, dès le commencement de la guerre, de quitter l'Italie, se
disposa à partir dès qu'il vit ses vaisseaux de retour ; et pour mieux
retarder une attaque de César, pour empêcher l'ennemi d'entrer dans
la ville au moment où il en sortirait, il fit murer les portes, barricader
les carrefours et les places, creuser des fossés en travers des rues.
On enfonça des bâtons pointus et des pieux, qu'on recouvrit
légèrement de claies et de terre. Quant aux deux avenues ou
chemins qui conduisaient du dehors de la ville au port, il les ferma au
moyen de hautes poutres pointues. Lorsque tout est prêt, il ordonne à
ses troupes de s'embarquer sans bruit, et dispose çà et là sur le
rempart et sur les tours des vétérans, des archers, des frondeurs.
Ceux-ci ont l'ordre de partir à un certain signal, quand ils verront
toutes les troupes embarquées ; et pour cela il leur laisse dans un
lieu sûr quelques barques légères.
28. Les habitants de Brindes, mécontents des outrages de Pompée
et des insultes de ses soldats, favorisaient le parti de César. Aussi,
dès qu'ils apprennent le départ de Pompée, tandis que ses soldats
courent çà et là pour s'y préparer, ils en donnent avis du haut des
toits : alors César, ne voulant pas laisser échapper l'occasion, fait
prendre les armes et préparer les échelles. Pompée, vers la nuit, lève
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