Page 16 - 2. La guerre civile
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l'ancre. Les gardes placés sur la muraille quittent leur poste au signal
convenu, et gagnent leurs vaisseaux par des chemins qu'ils
connaissent. Nos soldats escaladent le mur ; mais, avertis par les
habitants de prendre garde aux fossés et aux pièges, ils s'arrêtent ;
puis, guidés par ceux-ci, ils prennent un long détour qui les conduit
au port, et là se rendent maîtres, avec des esquifs et des bateaux, de
deux navires chargés de soldats qui avaient échoué contre la digue
de César.
29. César pouvait espérer de terminer à souhait cette affaire, s'il
assemblait des vaisseaux et poursuivait Pompée avant que celui-ci
eût tiré des secours d'outre-mer ; mais il craignit d'être obligé
d'attendre trop longtemps, parce que Pompée avait emmené avec lui
tous les vaisseaux, et par là lui avait ôté, pour le moment, tout moyen
de le poursuivre. Il n'avait donc qu'à attendre des vaisseaux des
contrées lointaines de la Gaule, du Picénum et du détroit de Sicile ;
mais la saison était un grand obstacle. Cependant il craignait que les
vieilles troupes et les deux Espagnes, dont l'une avait été comblée de
bienfaits par Pompée, ne s'attachassent à lui encore plus, qu'on
n'assemblât des secours, de la cavalerie, et qu'on n'attaquât la Gaule
et l'Italie en son absence.
30. Il renonce donc pour le moment à poursuivre Pompée, se décide
à partir pour l'Espagne, et ordonne aux décemvirs de toutes les villes
municipales de lui chercher des vaisseaux et de les amener à
Brindes. Il envoie en Sardaigne Valérius, son lieutenant, avec une
légion, et Curion en Sicile, comme propréteur avec quatre légions, lui
recommandant de passer en Afrique aussitôt que la Sicile sera
soumise. M. Cotta commandait alors en Sardaigne, M. Caton en
Sicile ; l'Afrique était échue à Tubéron. Dès que les habitants de
Caralis apprirent qu'on leur envoyait Valérius, sans même attendre
qu'il fût parti d'Italie, ils chassèrent spontanément Cotta de la ville.
Celui-ci, effrayé de voir que toute la province était d'intelligence,
s'enfuit de Sardaigne en Afrique. En Sicile, Caton faisait réparer les
vieilles galères et s'en faisait fournir de nouvelles par les villes. II y
portait le plus grand zèle. Il faisait faire par ses lieutenants dans la
Lucanie et le Bruttium des levées de citoyens romains, et exigeait des
villes de Sicile un nombre déterminé de cavaliers et de fantassins. À
peine ces préparatifs sont-ils achevés, qu'il apprend l'arrivée de
Curion : sur quoi il assemble le peuple et se plaint d'être abandonné,
trahi par Pompée, qui, sans être prêt en rien, a commencé une
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