Page 18 - 2. La guerre civile
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république. Il faut députer vers Pompée pour traiter d'un
accommodement. II n'a pas les préventions que Pompée a
exprimées naguère dans le sénat, en disant que députer vers un
homme c'est reconnaître son autorité ou témoigner qu'on le craint. De
tels sentiments sont, à ses yeux, d'une âme petite et faible ; et pour
lui, comme il s'est appliqué à se distinguer par ses exploits, il veut
aussi surpasser les autres en droiture et en équité."
33. Le sénat approuva l'envoi d'une députation ; mais ne trouvait
personne qui voulût en être : chacun, effrayé, refusait d'encourir les
risques. En effet, Pompée, à son départ, avait dit dans le sénat qu'il
ne ferait aucune différence entre les citoyens qui resteraient à Rome
et ceux qui iraient au camp de César. Ainsi trois jours se passent en
discussions et en excuses. De plus, L. Métellus, tribun du peuple, est
suscité par les ennemis de César pour écarter sa proposition et
entraver tous ses autres desseins. S'en étant aperçu, César, après
quelques jours de sollicitations inutiles, ne voulant pas perdre le
temps qui lui reste, part de Rome sans avoir rien terminé, et se rend
dans la Gaule ultérieure.
34. À son arrivée, César apprit que Pompée avait envoyé en
Espagne Vibullius Rufus, que peu de jours auparavant on avait pris à
Corfinium et relâché par son ordre ; qu'en outre, Domitius était parti
pour aller se jeter dans Marseille avec sept galères qu'il avait
enlevées par force à des particuliers dans l'île d'Igilium et dans le
Cosanum, et qu'il avait remplies de ses esclaves, de ses affranchis,
et de colons de ses terres ; et en outre, que Pompée, à son départ de
Rome, avait expédié devant lui, comme députés, dans leur patrie, de
jeunes Marseillais de nobles familles, en les exhortant à ne pas
oublier ses anciens bienfaits pour les obligations plus récentes qu'ils
pouvaient avoir à César. Conformément à ces instructions, les
Marseillais avaient fermé leurs portes à César, en appelant à leur
secours les Albiques, peuple sauvage qui, de tout temps, leur était
dévoué et qui habitait les montagnes au-dessus de Marseille ; ils
avaient fait entrer dans leur ville tout le blé des contrées et des
châteaux du voisinage, avaient établi des fabriques d'armes, et
réparaient leurs murailles, leurs portes, leurs navires.
35. César mande quinze des principaux Marseillais ; il les engage à
n'être pas les premiers à commencer la guerre, leur remontrant qu'ils
doivent plutôt suivre le sentiment de toute l'Italie que de déférer à la
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