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manger ensemble ? Ils sont tellement différents, ce que recherche l’un
            n’est pas ce que recherche l’autre. Parfois l’avoir vient dîner avec l’être
            comme ça, un moment. Et pour l’occasion il se travestit, il se fait
            paraître. Ce jeu peut lui plaire et lui convenir même pendant toute sa
            vie. Mais est-il bien de tricher avec soi-même ? Est-on après tout
            heureux ?

            Parader est un risque, car on a tendance à se fuir, à fuir la réalité et un
            jour il faudra de toute manière passer à la caisse : il faudra payer, pas
            avec du palliatif mais avec des vraies valeurs. Le tram était signalé
            depuis peu par le sémaphore placé à quelques mètres de hauteur au
            milieu de la route, on pouvait l’apercevoir. Il ne put continuer sur sa
            lancée, un poids lourd l’avait arrêté momentanément en lui coupant le
            passage. Le chauffeur du camion avait déchargé des palettes de
            carrelages bien arrimés qu’il avait déposés avec l’aide d’un bras
            mécanique devant un magasin qui se trouvait du côté du chemin ferré.
            Après que le chauffeur du camion ait fait quelques manœuvres pour
            dégager la voie, le tram pouvait poursuivre sa route et s’arrêter là où les
            voyageurs attendaient.

            Les portes automatiques s’ouvrirent devant eux, peu de personnes
            faisaient le voyage, l’heure du casse-croûte y était pour quelque chose.
            Nino monta :

            - Abonné, dit-il et puis il alla s’installer sur un fauteuil.

            Toutes les places étaient vides, cela évitait la bousculade des heures de
            pointe et cela permettait à chacun de choisir la place qu’il convoitait.
            Nino s’était placé sur un siège simple près de la vitre dans le sens de
            marche. Petit, il prenait aussi le tram avec sa mère. Il avait pourtant gardé
            un mauvais souvenir des trams de l’époque qui étaient plus bruyants et
            beaucoup moins confortables. Le roulis de ces machines l’avait poussé
            à vomir plusieurs fois, ce n’était agréable pour personne. Il avait par la
            suite pu trouver sa position qui était celle dirigée face à la route.
            A peine était-il assis qu’il songeait aux conditions de son travail. Tous
            les jours, il avalait cette fumée comme s’il sirotait un jus de fruit pendant



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