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le veut et merci de tes encouragements, et faisant demi-tour il prit la
direction de la sortie. Sa main était à peine sur la poignée que la voix de
Didier se fit entendre :
- Dis, c’est quand tu veux et remets mon bonjour à Jacqueline.
- Oui, je n’y manquerai pas dit-il en mettant un pied dehors et lentement
la porte se referma.
Il traversa la route pour se poster près de l’arrêt du bus qui devait passer
d’un instant à l’autre. Il pensa à Jacqueline. Didier, en le saluant, l’avait
indirectement invité. Le soleil entre temps avait percé les nuages
encombrants et ses rayons réchauffaient l’air ce qui modifiait la température
devenue plus clémente. Comment pouvait-il faire autrement ? Lui annoncer
cette mauvaise nouvelle l’accablait. Il aurait préféré que le mal soit pour
lui plutôt que pour elle, quoi de plus normal quand on aime vraiment une
personne. Le véritable amour est la dépossession de soi, c’est aller loin sans
limite, c’est dire oui pour un service, pour un travail même quand pour soi
c’est non. C’est placer l’autre avant, l’autre a donc la priorité il est votre
sujet et non votre objet. Il n’y a pas d’école structurée pour cela, il y en
a une si l’on veut c’est l’école de la vie, de l’expérience qui, si elle est
bien comprise, amène à la tendresse. Mais combien difficile car l’autre
est étranger à soi. Pourquoi pas moi d’abord ? Vous diront certains un
peu comme dit la chanson de Jacques Dutronc : « et moi et moi » ou
comme un enfant de cinq ans qui parle « maman, tu m’achètes un
nounours pour moi » ou aussi comme chez quelques adultes encore ado
avec leur « moi je par ci.», « moi je par là. ». C’est pour ceux-là le culte
de l’égo, du plaisir à sens unique bien entendu car l’autre est tellement
différent. Et puis si la chaussure n’est plus commode à son pied, on la
jette à la poubelle, la belle et grande poubelle de la société qui n’est
tenue à aucune conduite ou plutôt à une conduite anarchique sans code
de la route. Une vraie société de rêve ; imaginons cela : une circulation
sans priorité, sans stops, sans feux, des voitures sans freins « attention
là à gauche un poids lourd...ouf ! On l’a échappé belle. Mais ralentis,
arrête.. et puis freine, freine ! Et l’autre disant : Mais comment, je n’ai
pas de freins ! » Oui, c’est de l’imagination, est-elle si en décalage avec
la réalité ? Nino se souvient : il y a longtemps déjà que l’eau avait passé
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