Page 10 - La guerre des Gaules
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et si les Héduens reçoivent satisfaction pour les torts qu'eux et leurs
alliés ont subis, si les Allobroges obtiennent également réparation, il
est prêt à faire la paix. » Divico répondit que « les Helvètes tenaient
de leurs ancêtres un principe : ils recevaient des otages, ils n'en
donnaient point ; le peuple Romain pouvait en porter témoignage. »
Sur cette réponse, il partit.
15. Le lendemain, les Helvètes lèvent le camp. César fait de même,
et il envoie en avant toute sa cavalerie, environ quatre mille hommes
qu'il avait levés dans l'ensemble de la province et chez les Héduens
et leurs alliés ; elle devait se rendre compte de la direction prise par
l'ennemi. Ayant poursuivi avec trop d'ardeur l'arrière-garde des
Helvètes, elle a un engagement avec leur cavalerie sur un terrain
qu'elle n'a pas choisi, et perd quelques hommes. Ce combat exalta
l'orgueil de nos adversaires, qui avaient avec cinq cents cavaliers
repoussé une cavalerie si nombreuse : ils commencèrent à se
montrer plus audacieux, faisant face quelquefois et nous harcelant de
combats d'arrière-garde. César retenait ses soldats, et se contentait
pour le moment d'empêcher l'ennemi de voler, d'enlever le fourrage
et de détruire. On marcha ainsi près de quinze jours, sans qu'il y eût
jamais entre l'arrière-garde ennemie et notre avant-garde plus de
cinq ou six mille pas.
16. Cependant César réclamait chaque jour aux Héduens le blé qu'ils
lui avaient officiellement promis. Car, à cause du froid – la Gaule,
comme on l'a dit précédemment, est un pays septentrional –, non
seulement les moissons n'étaient pas mûres, mais le fourrage aussi
manquait ; quant au blé qu'il avait fait transporter par eau en
remontant la Saône, il ne pouvait guère en user, parce que les
Helvètes s'étaient écartés de la rivière et qu'il ne voulait pas les
perdre de vue. Les Héduens différaient leur livraison de jour en jour :
« On rassemblait les grains, disaient-ils, ils étaient en route, ils
arrivaient. » Quand César vit qu'on l'amusait, et que le jour était
proche où il faudrait distribuer aux soldats leur ration mensuelle, il
convoque les chefs héduens qui étaient en grand nombre dans son
camp ; parmi eux se trouvaient Diviciaros et Liscos ; ce dernier était
le magistrat suprême, que les Héduens appellent vergobret ; il est
nommé pour un an, et a droit de vie et de mort sur ses concitoyens ;
César se plaint vivement que, dans l'impassibilité d'acheter du blé ou
de s'en procurer dans la campagne, quand les circonstances sont si
critiques, l'ennemi si proche, il ne trouve pas d'aide auprès d'eux, et
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