Page 8 - La guerre des Gaules
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11. Les Helvètes avaient déjà franchi les défilés et traversé le pays
des Séquanes ; ils étaient parvenus chez les Héduens, et
ravageaient leurs terres. Ceux-ci, ne pouvant se défendre ni protéger
leurs biens, envoient une ambassade à César pour lui demander
secours : « Ils s'étaient, de tout temps, assez bien conduits envers le
peuple romain pour ne pas mériter que presque sous les yeux de
notre armée leurs champs fussent dévastés, leurs enfants emmenés
en esclavage, leurs villes prises d'assaut. En même temps les
Ambarres, peuple ami des Héduens et de même souche, font savoir
à César que leurs campagnes ont été ravagées, et qu'ils ont de la
peine à défendre leurs villes des agressions de l'ennemi. Enfin des
Allobroges qui avaient sur la rive droite du Rhône des villages et des
propriétés cherchent un refuge auprès de César et lui exposent que,
sauf le sol même, il ne leur reste plus rien. Ces faits décident César il
n'attendra pas que les Helvètes soient arrivés en Saintonge après
avoir consommé la ruine de nos alliés.
12. Il y a une rivière, la Saône, qui va se jeter dans le Rhône en
passant par les territoires des Héduens et des Séquanes ; son cours
est d'une incroyable lenteur, au point que l'œil ne peut juger du sens
du courant. Les Helvètes étaient en train de la franchir à l'aide de
radeaux et de barques assemblés. Quand César sut par ses
éclaireurs que déjà les trois quarts de leurs troupes avaient franchi la
rivière et qu'il ne restait plus sur la rive gauche que le quart environ
de l'armée, il partit de son camp pendant la troisième veille avec trois
légions et rejoignit ceux qui n'avaient pas encore passé. Ils étaient
embarrassés de leurs bagages et ne s'attendaient pas à une attaque.
César tailla en pièce la plus grande partie ; le reste chercha son salut
dans la fuite et se cacha dans les forêts voisines. Ces hommes
étaient ceux du canton des Tigurins : l'ensemble du peuple helvète se
divise, en effet, en quatre cantons. Ces Tigurins, ayant quitté seuls
leur pays au temps de nos pères, avaient tué le consul L. Cassius et
fait passer son armée sous le joug. Ainsi, soit effet du hasard, soit
dessein des dieux immortels, la partie de la nation helvète qui avait
infligé aux Romains un grand désastre fut la première à être punie.
En cette occasion, César ne vengea pas seulement son pays, mais
aussi sa famille : L. Pison, aïeul de son beau-père L. Pison, et
lieutenant de Cassius, avait été tué par les Tigurins dans le même
combat où Cassius avait péri.
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