Page 13 - La guerre des Gaules
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fortune et la puissance ainsi acquises, il s'en servait non seulement à
            affaiblir son crédit, mais même à préparer sa perte. Pourtant, c'était
            son frère,  et d'autre  part l'opinion publique  ne pouvait  le laisser
            indifférent.  Si César le traitait avec rigueur quand lui, Diviciacos,
            occupait un si haut rang dans son amitié, personne ne penserait que
            c'eût été contre son gré : et dès lors tous les Gaulois lui deviendraient
            hostiles. Il parlait avec abondance et versait des larmes. César prend
            sa main, le rassure, lui demande de mettre fin à ses instances ; il lui
            déclare qu'il estime assez haut son amitié pour sacrifier à son désir et
            à ses prières le tort fait aux Romains et l'indignation qu'il éprouve. Il
            fait venir Dumnorix et,  en présence de son frère, lui dit  ce qu'il lui
            reproche ; il lui expose ce qu'il sait, et les griefs de ses compatriotes ;
            il l'avertit d'avoir à éviter, pour l'avenir, tout soupçon ; il lui pardonne
            le passé en faveur de son frère Diviciacos ; il lui donne des gardes,
            afin de savoir ce qu'il fait et avec qui il s'entretient.

            21. Le même jour, ayant appris par ses éclaireurs que l'ennemi s'était
            arrêté au pied d'une montagne à  huit milles de son camp, César
            envoya une reconnaissance pour savoir ce qu'était cette montagne et
            quel accès offrait son pourtour. On lui rapporta qu'elle était d'accès
            facile. Il ordonne à Titus Labiénus, légat propréteur, d'aller, au cours
            de la troisième  veille, occuper la crête de la montagne avec deux
            légions, en se faisant guider par ceux qui avaient reconnu la route ; il
            lui fait connaître son plan. De son côté, pendant la quatrième veille, il
            marche à l'ennemi, par le même chemin que celui-ci avait pris, et
            détache en avant toute sa cavalerie. Elle était précédée par des
            éclaireurs sous les ordres de Publius Considius, qui passait pour un
            soldat très expérimenté et avait servi dans l'armée de Lucius Sulla,
            puis dans celle de Marcus Crassus.

            22. Au point du jour,  comme Labiénus occupait le  sommet de la
            montagne, que lui-même n'était plus qu'à quinze cents pas du camp
            ennemi, et que – il le sut plus tard par des prisonniers – on ne s'était
            aperçu ni de son approche, ni de celle de Labiénus, Considius
            accourt vers lui à bride abattue : « La montagne, dit-il, que Labiénus
            avait ordre d'occuper, ce sont les ennemis qui la tiennent : il a
            reconnu les Gaulois à leurs armes et  à  leurs  insignes. »  César
            ramène ses troupes sur une colline voisine et les range en bataille. Il
            avait recommandé à Labiénus de n'engager le combat qu'après avoir
            vu ses troupes près du camp ennemi, car il voulait que l'attaque se
            produisît simultanément de tous côtés : aussi le légat, après avoir pris

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