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surtout  parmi  les  plus  âgés  ;  ces  études  ne  les  intéressaient
            guère  ; ils avaient d’autres chats à fouetter. Certains voulaient
            fonder une famille ; ils en avaient les aptitudes. D’autres avaient
            la nostalgie de leurs villages ; ils profitaient pour la plupart et le
            plus souvent, des vacances scolaires pour fuguer.


            Kobiyo s’adapta admirablement bien à cette nouvelle situation ;
            remarqué pour son intelligence et son acharnement au travail, il
            fut  sélectionné  ainsi  que  d’autres  condisciples  pour  une
            préparation spécifique conduisant aux épreuves du certificat de
            fin  d’études  primaires.  Ce  diplôme  brillamment  obtenu,  il
            intégra l’École supérieure des cadres. Trois ans plus tard, classé
            parmi  les  trois  premiers  de  sa  promotion,  il  eut  le  loisir  de
            choisir son corps de fonction : les Finances.


            C’était  l’un  des  fonctionnaires  indigènes  les  mieux  payés  ;  ceci
            expliquait le train de vie qu’il menait. En fait le malin Kobiyo avait
            mis  au  point  un  stratagème  qui  lui  permettait  de  récupérer  de
            grosses sommes au nez et à la barbe des autorités coloniales. La
            combine était simple ! Des agents de l’administration faisaient le
            recensement des populations et lui remettaient les listes d’où il tirait
            les noms et adresses des sujets imposables ; or pour se soustraire à
            cette contrainte, des villageois se cachaient dans la forêt pendant le
            recensement ; ils ne figuraient donc pas sur les listes officielles.
            Kobiyo grâce à un réseau d’informateurs à sa solde arrivait toujours
            à lister la majorité des sacripants qu’il allait taxer. Les sommes qu’il
            récoltait  étaient  importantes  et  n’apparaissaient  dans  aucun
            document  officiel.  Kobiyo  se  les  appropriait,  une  infime  partie
            servant à récompenser les délateurs.
            Des années durant, le système fonctionna sans anicroche ce qui
            permit  à  l’indélicat  d’amasser  une  grosse  fortune  qu’il  ne
            pouvait hélas pas trop étaler. Sacs de billets de banques, bijoux,
            pierres précieuses étaient dissimulés dans un cercueil reposant


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