Page 6 - 2. La guerre civile
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guerre, et prononcé les vœux accoutumés. Ce qui ne s'était jamais
vu jusque là, les consuls sortent de la ville ; et de simples particuliers
se font précéder de licteurs à Rome et au Capitole, contre tous les
exemples du passé. On fait des levées par toute l'Italie, on
commande des armes, on exige de l'argent des villes municipales, on
en prend dans les temples : tous les droits divins et humains sont
confondus.
7. Informé de ce qui se passe, César harangue ses troupes. Il
rappelle les injures dont ses ennemis l'ont accablé dans tous les
temps, et se plaint que les efforts d'une malignité envieuse lui aient à
ce point aliéné Pompée dont il a toujours favorisé, secondé le crédit
et la puissance. Il se plaint que par une nouveauté, jusqu'alors sans
exemple dans la république, on en soit venu à diffamer, à étouffer,
par les armes, le droit d'opposition tribunitienne, rétabli les années
précédentes. Sylla, quoiqu'il eût dépouillé le tribunal de tout crédit, lui
avait du moins laissé la liberté d'opposition : Pompée, qui passe pour
lui avoir rendu ses anciens droits, lui a même ôté ceux qu'il possédait
auparavant. Il ajoute que, toutes les fois que l'on a décrété que les
magistrats eussent à veiller au salut de la république (lequel sénatus-
consulte appelle aux armes tout le peuple romain), ce décret n'a été
rendu qu'à l'occasion de lois désastreuses, de quelque violence
tribunitienne, d'une révolte du peuple, alors que les temples et les
lieux fortifiés ont été envahis ; que ces excès des siècles passés ont
été expiés par la mort de Saturninus et des Gracques ; que, pour le
présent, il n'a été rien fait, rien pensé de semblable ; aucune loi n'a
été promulguée, aucune proposition soumise au peuple, aucune
séparation consommée. Il les exhorte à défendre contre ses ennemis
l'honneur et la dignité du général sous lequel ils ont, pendant neuf
ans, si glorieusement servi la république, gagné tant de batailles,
soumis toute la Gaule et la Germanie. À ce discours, les soldats de la
treizième légion (César l'avait rappelée auprès de lui dès le
commencement des troubles ; les autres n'étaient pas encore
arrivées) s'écrient, d'une voix unanime, qu'ils sont prêts à venger les
injures de leur général et des tribuns du peuple.
8. Assuré des dispositions des soldats, César part avec cette légion
pour Ariminium, et y rencontre les tribuns du peuple qui venaient se
réfugier vers lui. Il tire ses autres légions de leurs quartiers d'hiver, et
leur ordonne de le suivre. Là, le jeune L. César, dont le père était un
de ses lieutenants, vient le joindre. Ce jeune homme, après lui avoir
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