Page 4 - 2. La guerre civile
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Antonius et Q. Cassius, tribuns du peuple, s'opposent au décret. Un
rapport est fait aussitôt sur l'opposition des tribuns : on ouvre des avis
pleins de violence ; et plus les mesures qu'on propose sont acerbes
et cruelles, plus on est applaudi par les ennemis de César.
3. Sur le soir, au sortir de l'assemblée, Pompée mande tous les
sénateurs. Il loue les uns et les encourage pour l'avenir ; il
réprimande et excite ceux qui se sont montrés timides. En même
temps il rappelle de tous côtés un grand nombre de vétérans de ses
armées, par l'espoir des récompenses et de l'avancement ; et la
plupart des soldats des deux légions envoyées par César sont
également appelés sous les drapeaux. Rome est remplie de
compagnons d'arme de Pompée, tribuns, centurions, rengagés. Les
amis des consuls, les partisans de Pompée, tous ceux qui avaient de
vieilles inimitiés contre César, se rendent en foule au sénat : par leurs
cris et par leur concours, ils intimident les faibles, rassurent ceux qui
hésitent, enfin enlèvent au plus grand nombre le pouvoir d'exprimer
franchement leur opinion. Le censeur L. Pison offre d'aller vers César
pour l'informer de ce qui se passe ; le préteur L. Roscius fait la même
proposition : ils ne demandent pour cela qu'un délai de six jours.
Quelques-uns même sont d'avis qu'on envoie à César des députés
qui lui exposent la volonté du sénat.
4. Ces divers avis sont rejetés ; on oppose à chacun d'eux le discours
du consul, de Scipion et de Caton. D'anciennes inimitiés et le chagrin
d'un refus animent Caton contre César. Lentulus, accablé de dettes,
espère obtenir une armée, des provinces, compte sur les largesses
des rois qui désirent notre alliance, et se vante parmi ses amis d'être
un autre Sylla, qui arrivera un jour à l'empire. Scipion se flatte
également d'avoir une province et une armée, dont il partagera le
commandement avec Pompée dont il est l'ami : ajoutez à cela la
crainte d'un jugement, l'intérêt de sa vanité, et la faveur des hommes
qui avaient alors le plus de pouvoir dans la république et dans les
tribunaux. Pompée lui-même, excité par les ennemis de César, et ne
voulant pas avoir d'égal, s'était séparé entièrement de lui, et
réconcilié avec leurs ennemis communs, qu'il avait attirés en grande
partie à César dans le temps de leur alliance. D'ailleurs, honteux de
sa conduite peu loyale par rapport aux deux légions destinées pour
l'Asie et la Syrie, et qu'il avait retenues pour établir par elles son
pouvoir et sa domination, il souhaitait qu'on en vint aux armes.
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