Page 5 - 2. La guerre civile
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5. Par ces motifs, tout se décide à la hâte et en tumulte ; on ne donne
pas le temps aux parents de César de l'avertir ; on ne laisse pas aux
tribuns du peuple le moyen de détourner le péril qui les menace, ou
de faire valoir leur dernier privilège, le droit d'opposition que L. Sylla
avait respecté. Ils sont forcés, dès le septième jour, de songer à leur
sûreté ; or, auparavant, les tribuns les plus séditieux ne rendaient
aucun compte et n'étaient pas inquiétés avant le huitième mois. Enfin
on a recours à ce sénatus-consulte, qui, par son importance, venait le
dernier de tous, alors que Rome était, pour ainsi dire, menacée
d'incendie, et que chacun désespérait de son salut : "Que les
consuls, les préteurs, les tribuns du peuple, et les consulaires qui
sont près de Rome, veillent à ce que la république ne reçoive aucun
dommage." Ce décret fut rendu le sept des ides de janvier. Ainsi, des
cinq premiers jours du consulat de Lentulus où le sénat put
s'assembler, deux furent employés à la tenue des comices, et le reste
à porter les décrets les plus hautains et les plus durs contre l'autorité
de César et contre les tribuns du peuple, si dignes de respect. Les
tribuns du peuple s'enfuient aussitôt de la ville et se rendent près de
César. Celui-ci était alors à Ravenne, où il attendait une réponse à
ses offres pleines de modération, souhaitant que l'équité des
hommes pût permettre le maintien de la paix.
6. Les jours suivants, le sénat s'assemble hors de Rome. Pompée y
répète tout ce que Scipion a déjà dit de sa part ; il loue le courage et
la fermeté du sénat ; il énumère ses forces ; il a toutes prêtes dix
légions ; en outre il sait d'une manière certaine que les soldats ne
sont pas affectionnés à César, et qu'on ne pourra les persuader de le
défendre ou de le suivre. Pour le reste, on en réfère au sénat : on
propose de faire des levées dans toute l'Italie, d'envoyer Faustus
Sylla en Mauritanie en qualité de propréteur, et de tirer de l'argent du
trésor public pour Pompée. On parle aussi de déclarer le roi Juba ami
et allié, du peuple romain. Mais Marcellus dit qu'il ne le souffrira pas ;
et Philippus, tribun du peuple, s'oppose de son côté à ce qu'on a
demandé pour Faustus. Le reste passe en décrets. On accorde des
gouvernements à de simples particuliers : deux de ces
gouvernements étaient consulaires, les autres prétoriens. À Scipion
échoit la Syrie ; à L. Domitius la Gaule. Philippus et Cotta sont
oubliés par des intrigues particulières ; leurs noms ne sont pas tirés
au sort. On envoie des préteurs dans les autres provinces, et ils
partent sans attendre, comme cela se pratiquait les autres années,
que le peuple ait ratifié leur élection, qu'ils aient revêtu l'habit de
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