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Après le chef, c’est le cousin abhorré qu’il frappa. Chaque fois
que l’administration avait besoin d’hommes pour les travaux
forcés, Bokito était embrigadé d’office. Il avait beau protester,
demandant un roulement parmi les villageois ou tout au moins
une pose, personne ne l’écoutait. Il faisait toujours partie du
contingent délégué par son village. Sa mère essaya de raisonner
Kobiyo trouvant injuste la réquisition systématique de son fils
qui, de plus, était le seul homme de la famille. « Tu es bien placé
alors fais quelque chose pour ton cousin, ils vont le tuer » ! finit-
elle par crier. Kobiyo resta sourd aux sollicitations de sa tante.
Et pour cause ! C’est lui qui donnait les ordres ; il assouvissait
ainsi sa vengeance avec cynisme et délectation.
Regard sur l’indigénat
Les travaux forcés ? Un avatar de l’esclavage ! Ceux qui y
étaient contraints le constataient à leurs dépens. Lever à cinq
heures du matin, une infâme bouillie de maïs, de manioc ou des
restes à peine réchauffés du repas de la veille pour petit
déjeuner et, dès six heures, travaux éreintants activés par des
garde-chiourmes cruels, armés de chicottes en rotin ou de
gourdins, qui vous forçaient souvent à chanter pendant les durs
travaux imposés, sous la pluie ou sous un soleil de plomb. Le
refus d’obtempérer donnait droit à une avalanche de coups de
chicottes et de gourdins ; coups de poing, coups de pied, jusqu’à
la soumission, parfois la mort.
Pause d’une demi-heure à midi. On vous servait alors dans des
écuelles ou des feuilles de bananier un infect repas à base de
manioc ou des bananes plantain, de la verdure constituée le plus
souvent par des feuilles de manioc pilées cuites à l’eau, ou alors
un bouillon où apparaissaient parfois quelques morceaux d’os
entourés de viande grise, graisseuse et visqueuse peu ragoûtante,
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